Obligations ou CPG?

Cet article a été publié initialement le 2 février 2023 et a été mis à jour le 22 novembre 2023.

Règle générale, les obligations jouent deux rôles essentiels dans un portefeuille. D’abord, elles constituent une source de revenus grâce aux versements de coupons. Ensuite, historiquement, elles ont protégé les portefeuilles équilibrés contre les baisses. En temps normal, lorsque des actions sont liquidées, ce sont des obligations qui atténuent le choc. Ce n’est toutefois pas ce qui s’est produit récemment. En 2022, par exemple, tant les obligations que les actions ont périclité, situation qui ne se produit que rarement. Et en 2023, les obligations ont maintenu leur comportement étrange.

Jusqu’ici en 2023, les taux d’inflation aux États-Unis et au Canada ont baissé de moitié, alors que les rendements des différentes catégories d’actifs à revenu fixe ont augmenté. Les rendements des obligations d’État américaines et canadiennes à 10 ans ont respectivement augmenté de 1,0 % et de 0,8 %. La performance des obligations a souffert, parce que les prix et les rendements obligataires évoluent en sens opposé.

Pourquoi les taux d’intérêt ont-ils augmenté, et cette tendance va-t-elle se maintenir?

De nombreux facteurs déterminent la trajectoire des taux d’intérêt. En voici quelques-uns qui, selon nous, expliquent pourquoi le rendement du Trésor américain à 10 ans a atteint des niveaux inégalés depuis la période précédant la crise financière mondiale.

La résilience de l’économie

Malgré les données qui semblent indiquer le contraire, l’activité économique est restée solide, surtout grâce aux dépenses de consommation. Le marché obligataire s’attendait à un ralentissement de l’économie américaine, et le rendement à 10 ans a tendance à évoluer dans le même sens que les prévisions économiques. En conséquence, lorsque les données ont révélé une hausse inattendue, le marché a donné l’impulsion à une hausse des rendements.

L’incertitude politique

Dans le climat politique qui prévaut actuellement aux États-Unis, la recherche de compromis est ardue. Au cours de l’été, l’incertitude entourant le relèvement du plafond de la dette et le besoin d’accroître l’endettement ont amené l’agence de notation Fitch Ratings à abaisser la note de la dette du Trésor américain, qui a chuté de AAA à AA+. Plus récemment, la crainte d’une interruption des activités du gouvernement a donné lieu à des spéculations selon lesquelles Moody’s, une autre agence de notation, abaisserait également la note en deçà de AAA. Cela a entraîné une baisse du prix des bons du Trésor américain à 10 ans et, par conséquent, une hausse des rendements.

Le déséquilibre entre l’offre et la demande

Les grands investisseurs historiques de bons du Trésor américain, tels que les régimes de retraite étrangers et les fonds souverains, ont récemment réduit leur exposition à ces titres. La Réserve fédérale américaine ayant également réduit ses achats d’obligations, cela fait un acheteur habituel de moins, justement au moment où les États-Unis devront probablement mettre en circulation un plus grand nombre de titres de dette publique pour financer leurs dépenses.

Même si ces facteurs produisent une hausse des rendements, nous pensons que l’économie va probablement s’affaiblir par rapport à la conjoncture actuelle. Nous pensons qu’il sera plus difficile pour les consommateurs de supporter ce fardeau économique alors que leur épargne s’effrite, que leurs dettes de cartes de crédit s’accroissent et que cet endettement coûte plus cher. En cas de ramollissement économique, on verra probablement une baisse des taux obligataires et une amélioration du rendement des obligations.

Les rendements des CPG sont certes intéressants… mais plus que ceux des obligations?

Les hausses des taux d’intérêt des deux dernières années ont eu un effet positif : les obligations et les certificats de placement garantis (CPG) offrent désormais des rendements très intéressants. De nombreux investisseurs se demandent même s’ils ne feraient pas mieux d’investir dans des CPG plutôt que dans des obligations, étant donné que les deux types de produits génèrent maintenant des rendements comparables.

Si la sécurité d’un CPG peut être intéressante pour des investisseurs dont l’horizon de placement est inférieur à un an, dans le cas d’investisseurs dont l’horizon est plus long, nous avons tendance à les mettre en garde contre l’achat de CPG en remplacement d’obligations dans un portefeuille équilibré, et ce, pour trois raisons principales.

• Les obligations canadiennes produisent habituellement des rendements supérieurs à ceux des CPG.
• L’écart de rendement entre les obligations et les CPG est généralement marqué.
• Les investisseurs qui optent pour des CPG courent un risque de réinvestissement.

Les obligations canadiennes produisent habituellement des rendements supérieurs à ceux des CPG

Depuis la création de l’indice obligataire universel FTSE Canada, les rendements des obligations canadiennes ont surpassé deux des CPG près de 73 % et 90 % du temps respectivement sur une base mobile d’un an et de trois ans (Bloomberg). Règle générale, lorsque des investisseurs comparent des CPG à des obligations, ils ne font que comparer le taux actuel du CPG au rendement obligataire. Bien que cette comparaison soit valable quand il est question du revenu généré, elle ne tient pas compte d’un aspect important : il existe un potentiel d’appréciation associé aux obligations, ce qui n’est pas le cas des CPG.

La corrélation inverse entre les obligations et les taux d’intérêt, qui a nui aux rendements obligataires au cours des deux dernières années, a désormais des chances de leur donner une impulsion. Les mesures de l’inflation que nous suivons nous indiquent que l’inflation a atteint un sommet et pourrait continuer à baisser. La Banque du Canada a déjà suspendu l’augmentation de son taux d’intérêt, et elle prévoit maintenant des réductions potentielles en 2024, ce qui pourrait favoriser une baisse des rendements et une hausse du cours des obligations. À notre avis, les récents rendements supérieurs des CPG étaient une exception et il est probable que nous revenions à un environnement où les obligations génèrent des rendements plus élevés que les CPG.

L’écart de rendement entre les obligations et les CPG est généralement marqué

Le graphique ci-dessous montre que la différence de rendement entre les obligations canadiennes mesurée par l’indice obligataire universel FTSE Canada et les CPG est souvent marquée. Par exemple, depuis la création de cet indice, le rendement des obligations canadiennes a surpassé celui des CPG de plus de 2,5 % par année dans 50 % des cas. Mais en fait, dans près de 30 % des cas, la différence est supérieure à 5 %! Étant donné un rendement de près de 6 % pour les obligations canadiennes de première qualité et la probabilité d’une hausse des cours dans un contexte de recul des taux d’intérêt, il est possible que les obligations génèrent des rendements beaucoup plus élevés que les CPG à l’avenir.

Les investisseurs qui optent pour des CPG à long terme courent un risque de réinvestissement

Lorsque leurs CPG arrivent à échéance, les investisseurs ont une décision à prendre concernant leur argent : soit réinvestir dans un CPG au taux alors en vigueur, soit investir dans un autre outil de placement. Nous croyons qu’au cours des prochaines années, les taux d’intérêt seront probablement plus bas, ce qui pourrait donner lieu à des taux de CPG bien inférieurs à ceux des CPG initialement achetés. D’ailleurs, de nombreux taux de CPG à long terme actuellement proposés sont inférieurs à ce qu’ils étaient il y a seulement quelques mois. Bien que les rendements obligataires soient également susceptibles d’être plus faibles, les possibilités d’investissement sont beaucoup plus importantes. Les gestionnaires de titres à revenu fixe actifs peuvent allouer des fonds à la meilleure occasion relative, qu’il s’agisse d’obligations d’État mondiales, d’obligations de sociétés de grande qualité, voire d’obligations à rendement élevé.

Les obligations et les CPG retrouveront-ils leurs rendements historiques?

Il s’agit probablement de la période la plus faste des 15 dernières années pour trouver des occasions au sein des obligations, la dernière fois correspondant à la crise financière mondiale.

Les investisseurs ont tendance à faire preuve d’un biais fondé sur la récence; il s’agit d’une réaction comportementale qui consiste à s’attendre à ce que les rendements récents (bons ou mauvais) se maintiennent. Les investisseurs pourraient comparer les taux courants des CPG à la volatilité et aux rendements négatifs des obligations depuis 2022 et tenir pour acquis qu’il en sera de même à l’avenir. Bien que les taux puissent surprendre par une hausse par rapport aux niveaux actuels, c’est probablement déjà fait en grande partie. Il existe toujours un risque d’événement exceptionnel ou de fluctuations des rendements dans l’immédiat, ce qui souligne la nécessité d’une gestion active des investissements obligataires sur le plan du crédit et de la durée.

Nous croyons qu’un ralentissement économique mondial continuera d’exercer une pression à la baisse sur l’inflation, ce qui entraînera une baisse des taux d’intérêt au cours des prochaines années. Cela pourrait faire en sorte que les rendements des obligations reviennent à leur traditionnelle supériorité par rapport à ceux des CPG.