Connaître une fin heureuse en matière de placements : les leçons tirées des contes de fées

L’économie : « Boucle d’or et les trois ours »

Dans le conte de fées « Boucle d’or et les trois ours », une jeune fille nommée Boucle d’or découvre une maison vide dans les bois où elle trouve trois bols de gruau, trois chaises et trois lits. Après les avoir tous essayés, elle finit par trouver un article de chaque type qui lui convient parfaitement, puis s’assoupit. La sieste paisible de Boucle d’or est interrompue lorsque les trois ours reviennent à la maison. À ce moment, la fillette prend la fuite et disparaît à tout jamais.

Nombreux sont ceux qui connaissent l’expression « économie Boucle d’or », utilisée pour décrire un environnement économique qui n’est « ni trop chaud, ni trop froid, mais juste parfait ». Certains investisseurs ont utilisé ce terme au début de l’année pour décrire l’état de l’économie mondiale; cependant, nous pensons que cette idée d’une économie parfaite révèle un excès de confiance qui pourrait mener à des résultats inattendus en cas d’imprudence. L’économie mondiale a ralenti tout au long de l’année et nous pensons que l’équilibre des risques reste à la baisse.

Les indices mondiaux des directeurs d'achat S&P sont des enquêtes économiques mensuelles menées auprès d’entreprises soigneusement sélectionnées dans les secteurs manufacturiers et des services. Ils donnent un aperçu de l’évolution future de l’activité économique dans le secteur privé en suivant certains indicateurs comme la production, les nouvelles commandes, l’emploi et les prix dans les principaux secteurs. Un résultat supérieur à 50 indique que la production manufacturière ou du secteur des services augmente et un résultat inférieur à 50 indique un repli.

Au début du second semestre, le secteur manufacturier mondial a connu un ralentissement de la croissance, la production augmentant au rythme le plus faible depuis un an. Les plus grandes économies du monde (États-Unis, Europe et Chine continentale) en sont témoins et, à ce stade, les perspectives ne devraient pas s’améliorer de façon radicale en raison de la baisse des nouvelles commandes. Les services mondiaux, en revanche, ne suivent pas la tendance et ont progressé au cours des dix-huit derniers mois. Les services suivent généralement la vigueur de la consommation des ménages, et la consommation des ménages est à son tour influencée par la croissance du revenu provenant de l’emploi, de la hausse des salaires, de la croissance du crédit et de l’épargne excédentaire. L’épargne excédentaire accumulée pendant la pandémie a été épuisée alors même que les banques continuaient à resserrer leurs normes de crédit, ce qui a entraîné un ralentissement de la croissance des prêts. Si la croissance des revenus et de l’emploi a bien résisté, les fissures apparues au début de l’été sont de plus en plus profondes. 

L’économiste Claudia Sahm a créé la règle de Sahm pour surveiller le risque de récession en fonction du taux de chômage. Selon cette règle, les États-Unis sont susceptibles d’être entrés dans les premiers stades d’une récession lorsque la moyenne mobile sur 3 mois du taux de chômage américain augmente d’au moins 50 points de base par rapport à son niveau le plus bas au cours des 12 mois précédents. Le taux de chômage aux États-Unis est passé à 4,3 % en juillet, par rapport à 3,4 % en janvier 2023; en d’autres termes, le seuil de la règle de Sahm a été franchi en juillet.

Si la résilience récente de l’économie parle d’elle-même, nous pensons que les épargnants ne devraient pas faire preuve de complaisance; l’idée que cette économie parfaite se maintiendra pourrait mener à des résultats inattendus en cas d’imprudence.

Si l’économie semble solide pour l’instant, nous devons nous rappeler que, comme dans l’histoire de Boucle d’or, ce conte de fées pourrait ne pas durer éternellement.

Actions : « Le vilain petit canard »

« Le vilain petit canard » est un conte de fées qui raconte l’histoire d’un caneton différent des autres et qui est rapidement rejeté par ses frères et sœurs et par les autres animaux. Le caneton passe son temps à chercher à se faire accepter jusqu’au jour où, une fois adulte, il rejoint une bande de cygnes. Lorsqu’il voit son reflet dans l’eau, il se rend compte qu’il n’est pas du tout un vilain petit canard, mais qu’il a toujours été un magnifique cygne.

Nous pensons qu’il existe des similitudes entre ce conte et le contexte actuel des placements dans les actions. Le marché des actions s’est concentré sur une poignée de grandes sociétés à forte capitalisation, communément appelées les « sept magnifiques » tout en méprisant la plupart des autres sociétés de l’indice S&P 500. En toute honnêteté, certaines de ces entreprises ont connu d’excellents rendements et, comme elles représentent une part importante du marché des actions américaines, elles sont largement considérées comme les principaux moteurs du rendement. Cela dit, elles ne sont pas les seules à avoir tiré leur épingle du jeu cette année; en fait, plus de 170 entreprises ont connu des rendements supérieurs à ceux de l’indice S&P 500 depuis le début de l’année¹.

Compte tenu du ralentissement de l’environnement économique, comme l’indiquent les données sur le secteur manufacturier de l’Institute for Supply Management, nous pensons que les bénéfices des entreprises seront probablement beaucoup plus fluctuants et variés. Nous sommes d’avis qu’il est judicieux de se concentrer davantage sur des facteurs de qualité, notamment un rendement élevé du capital investi, un rendement élevé des capitaux propres, de solides flux de trésorerie récurrents et des marges stables, car ils sont plus susceptibles d’être récompensés dans ce type d’environnement.

Selon nous, les valorisations, mesurées par les ratios cours/bénéfice (C/B), semblent s’étirer, non seulement aux États-Unis, mais dans le monde entier. Bien que le ratio C/B ne soit qu’un moyen parmi d’autres de mesurer la valeur, il peut donner une idée générale de l’existence éventuelle d’une meilleure occasion dans d’autres régions, relativement parlant. Dans l’état actuel des choses, il ne semble pas y en avoir. 

Toutefois, c’est une période au cours de laquelle les gestionnaires de portefeuilles actifs ont la possibilité de briller en scrutant les principaux indices boursiers pour dénicher des occasions de placements à l’échelle de chaque entreprise. Il s’agit moins de savoir où investir que dans quoi investir.

Dans un environnement caractérisé par des données économiques plus faibles, une croissance incertaine des bénéfices et des valorisations élevées, il est important de regarder au-delà de l’apparence pour déceler les entreprises qui pourraient d’abord être considérées comme de vilains petits canards – elles pourraient en fait être des cygnes qui n’attendent que de se révéler. 

Titres à revenu fixe : « Les trois petits cochons »

Cette fable raconte l’histoire de trois cochons qui ont chacun construit une maison avec des matériaux différents (paille, bois et briques) pour se protéger d’un loup déterminé à souffler dessus jusqu’à ce qu’elles s’effondrent. Cette histoire illustre la nécessité d’être patient et l’importance de bâtir une maison (ou un actif) qui puisse résister à l’épreuve du temps.

Nous pensons que ce récit se prête tout à fait aux placements dans les titres à revenu fixe, qui, pour beaucoup, n’ont pas donné les résultats escomptés depuis la fin de l’année 2022. Alors que le contexte de ralentissement de l’inflation et les attentes à l’égard d’une baisse des taux d’intérêt ont théoriquement plaidé en faveur des placements obligataires, le résultat anticipé ne s’est toujours pas réalisé et la patience a été de mise. Dans ce contexte, nous nous sommes demandé « à quel point notre maison de titres à revenu fixe est solide ».

Avant d’aborder l’histoire des titres à revenu fixe, il est important de revenir rapidement sur la trajectoire de l’inflation, car c’est un facteur qui déterminera les attentes en matière de taux d’intérêt et les rendements des obligations.

Les banques centrales mondiales (à l’exception de la Banque populaire de Chine et de la Banque du Japon) ont commencé à relever leur taux de financement à un jour de manière audacieuse en 2022 afin d’endiguer l’inflation élevée. Quelques années plus tard, les banques centrales ont fait d’énormes progrès dans la réduction de l’inflation. L’inflation mondiale, mesurée par l’indice d’inflation Bloomberg World Economy Weighted, qui suit l’évolution de l’indice des prix à la consommation pour plus de 98 % de l’économie mondiale, a culminé à 10,4 % en novembre 2022 et a chuté de plus de moitié, à près de 5 %, en août 2024. Cela montre que le cycle mondial d’assouplissement est clairement en cours, 35,0 % des banques centrales mondiales ayant réduit leurs taux d’intérêt. Ensemble, ils représentent environ 46,0 % du produit intérieur brut (PIB) mondial¹.

Les épargnants doivent comprendre que le risque de hausse des taux est derrière nous et que la voie de la moindre résistance pour les taux se déplace vers la baisse. Bien que nous restions sceptiques quant au retour des taux d’intérêt des banques centrales aux États-Unis et au Canada à des niveaux prépandémiques, il est probable que nous nous retrouverons quelque part dans la fourchette de 2 % à 3 %. Nous croyons que cela constituera un catalyseur positif pour les portefeuilles obligataires. 

Notre étude en trois phases sur les placements dans les titres à revenu fixe a examiné toutes les options prévues pour les obligations à venir. Nous avons défini les trois phases suivantes : le juste milieu, la durée, un avantage, et la prise de risques. Il nous semble évident que de nombreuses économies se trouvent dans la deuxième phase, ce qui pourrait justifier une augmentation tactique de la durée pour profiter de la baisse des rendements. 

Il est important de noter que les rendements peuvent encore baisser en raison de l’affaiblissement de la conjoncture économique. Il convient également de noter que les prix moyens des obligations de divers indices obligataires se négocient en dessous de leurs valeurs moyennes sur des périodes de 5 et 10 ans.

Cela signifie qu’il reste encore des occasions à saisir sur le marché des titres à revenu fixe, mais que les épargnants devront être plus attentifs pour les découvrir. L’épargnant détenteur de placements à revenu fixe qui fait preuve de prudence et de patience en prenant le temps de bâtir son portefeuille à partir des meilleurs produits, comme le troisième cochon de l’histoire, a plus de chances de voir son dur labeur récompensé.

Volatilité des marchés : « Hansel et Gretel »

« Hansel et Gretel » raconte l’histoire d’un frère et d’une sœur qui ont été abandonnés dans les bois avant d’être trouvés par une vieille femme apparemment amicale, mais qui s’est avérée être une sorcière effrayante qui avait l’intention de les manger tous les deux. Plutôt que de succomber à ses peurs, la jeune Gretel saisit l’occasion de retourner la situation contre la sorcière, ce qui lui permet, ainsi qu’à son frère, de s’enfuir en toute sécurité.

Les épargnants, comme les deux enfants de l’histoire, peuvent souvent être pris au dépourvu par les frayeurs du marché, mais ils ont eux aussi intérêt à analyser la situation calmement et à saisir toutes les occasions qui se présentent pour obtenir le résultat souhaité plutôt que de se laisser paralyser par la peur.

Au début du mois d’août, l’indice S&P 500 semblait être à son apogée, alors que les intervenants sur le marché s’attendaient à une reprise graduelle de l’économie américaine. Selon nous, toute donnée économique clé inférieure aux attentes aurait pu déclencher une vente massive de titres.

L’annonce conciliante de la Réserve fédérale américaine, les faibles chiffres sur l’emploi aux États-Unis et les actualités géopolitiques à l’échelle mondiale étaient les ingrédients parfaits pour provoquer une hausse de la volatilité des marchés.

L’indice de volatilité CBOE (VIX) est une mesure de la peur associée à l’investissement pour l’indice S&P 500. Le VIX a franchi le niveau de 30 pour la première fois depuis octobre 2022 lors de la liquidation d’août (il est depuis redescendu, se négociant en dessous de sa moyenne historique d’environ 19)¹.

Bien que cette courte période de volatilité soit derrière nous, il est évident qu’elle reviendra. Malheureusement, comme Hansel et Gretel, les épargnants seront probablement pris au dépourvu, car il est pratiquement impossible de prédire les sources exactes du risque futur, et encore moins de le prévoir. Il n’est pas surprenant que les prochaines élections américaines aient été considérées comme un facteur potentiel de volatilité supplémentaire sur les marchés.

Les élections, la croissance économique et les marchés évoluent tous de façon cyclique. Même s’il leur arrive de coïncider, ce n’est pas toujours le cas. Bien que les politiques gouvernementales puissent exercer une influence sur l’économie et les marchés, celle-ci est rarement immédiate ou profonde. En nous fondant sur des données remontant jusqu’en 1945, nous constatons en moyenne peu de différences dans les rendements de l’indice S&P 500 au cours de l’année civile, que l’administration soit démocrate ou républicaine. Si certains peuvent noter que les données semblent indiquer que l’indice a légèrement tiré de l’arrière sous une administration républicaine, il convient de noter que les résultats ont été quelque peu faussés par des événements financiers mondiaux tels que la bulle technologique et la grande crise financière.

Quelle que soit la source de la volatilité, il est important pour les investisseurs de prendre du recul et d’avoir une vue d’ensemble. Les corrections du marché sont normales et très difficiles à prévoir. Depuis 1980, l’indice S&P 500 a chuté en moyenne d’environ 14 % au cours d’une année civile donnée, mais il est positif 75 % du temps, avec un rendement moyen d’environ 10 %¹. Il peut être difficile de s’en rendre compte sur le moment, mais les périodes de forte volatilité sur les marchés peuvent même receler des occasions à saisir pour les investisseurs à long terme. Depuis 1990, au cours des 12 mois qui ont suivi le franchissement du seuil de 30 par l’indice VIX, l’indice S&P 500 a progressé de plus de 22 % en moyenne. 

Si les marchés devaient connaître une plus grande volatilité à court ou à long terme, nous pensons que les investisseurs devraient faire appel à la Gretel qui sommeille en eux : évaluer la situation calmement en attendant le bon moment pour agir plutôt que de laisser leur peur les pousser à prendre la mauvaise décision.

En fin de compte, les contes de fées ne sont que des histoires, mais ce qui importe, c’est notre façon de les interpréter. Les leçons retenues peuvent être appliquées de multiples façons, et elles ne sont pas réservées aux enfants. Nous pensons qu’il y a des leçons à tirer et à appliquer dans le domaine des placements également, et que ces contes de fées pourraient contribuer à rendre les investisseurs heureux pour toujours.

Il s’agit d’une version actualisée de notre précédent article, Que peuvent nous apprendre les contes de fées sur les placements dans les marchés d’aujourd’hui?

1 Bloomberg, au 21 août 2024.