Impôt successoral des États-Unis visant les résidents canadiens qui ne sont pas citoyens américains
Le point sur les placements
Il est bien connu que le Canada n’impose pas les biens d’une succession1. Or, certains résidents canadiens fortunés2 ignorent peut-être qu’ils pourraient être assujettis à l’impôt successoral des États‑Unis à leur décès.
Impôt successoral des États-Unis
Les résidents canadiens qui ne se qualifient pas à titre de « personne des États-Unis » (soit un citoyen ou un titulaire d’une carte verte) peuvent néanmoins voir leurs biens situés en sol américain assujettis à l’impôt successoral des États-Unis, si la valeur de l’avoir qu’ils détiennent à travers le monde au moment de leur décès excède un certain seuil³. Les biens situés en sol américain comprennent, entre autres, les propriétés immobilières situées aux États-Unis (p. ex., une résidence secondaire en Floride) et les parts de sociétés américaines (p. ex., actions d’Apple Inc.), même si ces titres sont détenus dans un compte de courtage canadien, y compris dans un régime enregistré comme un régime enregistré d’épargne-retraite (REER) ou un compte d’épargne libre d’impôt (CELI). En revanche, il faut savoir qu’un placement dans les actions émises par une société de placement à capital variable canadienne ou les parts d’une fiducie de fonds commun de placement canadienne, d’un fonds négocié en bourse (FNB) canadien ou d’un contrat de fonds distinct canadien n’est pas considéré comme un bien situé en sol américain, même si le fonds détient des titres de sociétés américaines.
Allégement aux termes de la Convention fiscale entre le Canada et les États-Unis
Pour l’année 2024, les particuliers dont l’avoir détenu à travers le monde vaut plus de 13 610 000 $ US sont assujettis à l’impôt successoral des États-Unis, selon la valeur de leurs biens dans ce pays. Le taux d’imposition marginal américain le plus bas est de 18 % et il peut atteindre 40 % lorsque la valeur des biens aux États-Unis dépasse 1 000 000 $.
Tableau 1
La Convention fiscale entre le Canada et les États-Unis prévoit trois formes d’allégement permettant aux résidents canadiens de réduire l’impôt successoral à payer aux États-Unis :
- Crédit global
- Crédit pour personne mariée
- Crédit pour impôt étranger
Crédit global
Le crédit global permet à un citoyen américain de faire don d’une partie de ses biens à des tiers sans être assujetti à l’impôt successoral ou sur les donations. L’article XXIX B de la Convention fiscale permet aux résidents canadiens d’appliquer une part proportionnelle du montant du crédit global à l’impôt successoral payable aux États-Unis. Pour l’année 2024, la succession d’un résident canadien peut réduire son fardeau fiscal américain en réclamant un crédit global correspondant au plus élevé des deux montants suivants :
Crédit pour personne mariée
La Convention fiscale entre le Canada et les États-Unis prévoit en outre le crédit pour personne mariée, qui s’applique lorsqu’un des époux décède et que le conjoint survivant hérite de biens situés aux États‑Unis. Il correspond au moins élevé des montants suivants : la valeur du crédit global ou le montant d’impôt successoral à payer aux États-Unis.
Exemple
Un résident canadien, à son décès, laisse une succession mondiale d’une valeur de 15 000 000 $, incluant des biens situés aux États-Unis dont la valeur est établie à 2 000 000 $, dont hérite sa veuve. L’impôt successoral des États-Unis est calculé comme suit :
Impôt successoral des États‑Unis sur les biens de 2 000 000 $ |
745 800 $ |
Crédit global |
(718 640 $) |
Impôt successoral des États‑Unis net |
27 160 $ |
Crédit pour personne mariée |
(27 160 $) |
Impôt successoral des États‑Unis à payer |
0 $ |
Dans cet exemple, si les biens situés aux États-Unis n’étaient pas dévolus au conjoint survivant, l’impôt successoral à payer aux États-Unis s’élèverait à 27 160 $, le crédit pour personne mariée étant alors inapplicable.
Crédit pour impôt étranger
La Convention fiscale entre le Canada et les États-Unis permet aux résidents canadiens tenus à l’impôt successoral des États-Unis de réclamer un crédit pour impôt étranger à cet effet dans la déclaration de revenus produite au Canada pour l’année d’imposition au cours de laquelle est survenu le décès. Ce crédit peut réduire ou éliminer l’impôt à payer au Canada sur les biens visés par l’impôt successoral des États-Unis. En fin de compte, le contribuable paye généralement le plus élevé des deux impôts.
Cela dit, en ce qui a trait aux biens non enregistrés, comme des immeubles ou les actions, l’impôt canadien ne s’applique que sur les gains en capital au décès, plutôt que sur la juste valeur marchande. Comme les taux d’imposition applicables aux gains en capital au Canada sont inférieurs au taux maximal d’impôt successoral des États-Unis (soit 40 %), la succession sera vraisemblablement imposée au taux américain. Par ailleurs, règle générale, les provinces et les territoires n’offrent aucun crédit pour impôt étranger permettant de déduire l’impôt successoral payé aux États-Unis. Il peut donc en résulter une double imposition au palier provincial ou territorial.
Documents à produire
Au décès d’un résident canadien qui n’est pas un citoyen américain et qui détient des biens aux États-Unis dont la juste valeur marchande excède 60 000 $ US, la succession doit produire une déclaration d’impôt auprès de l’Internal Revenue Service. Cette obligation s’applique même si la Convention fiscale entre le Canada et les États-Unis fait en sorte qu’aucun impôt successoral n’est payable. Les résidents canadiens doivent utiliser le formulaire 706‑NA (United States Estate (and Generation-Skipping Transfer) Tax Return) pour produire une déclaration d’impôt de succession pour les non-résidents des États-Unis afin de faire valoir leurs droits aux termes de la Convention (le crédit global) et de voir à ce que leurs bénéficiaires aient droit au rajustement à la juste valeur marchande des biens au moment du décès, faute de quoi la valeur des biens dévolus aux bénéficiaires est réputée nulle, ce qui donne lieu à une double imposition au moment où ils en disposent ou décèdent à leur tour.
Êtes-vous assujetti à l’impôt des États-Unis?
Il est important de tenir compte des conséquences potentielles lorsqu’on détient un avoir important à l’étranger et aux États-Unis, tant sur le plan fiscal (impôt sur le revenu, impôt successoral et impôt sur les donations) qu’en matière d’homologation de la succession. Chaque situation doit être examinée à la lumière des faits particuliers en cause. Consultez votre conseiller afin de déterminer si l’impôt successoral des États-Unis pourrait s’appliquer à vous, et discutez des formes de planification envisageables.
1 À son décès, un résident canadien est réputé avoir disposé de l’ensemble de ses biens à leur juste valeur marchande. Le gain ou la perte en capital qui en résulte entre dans le calcul du revenu du défunt et figure à la déclaration finale, sauf en cas de transfert admissible au conjoint ou à une fiducie établie au profit de celui-ci. En outre, l’homologation de la succession pourrait également être requise dans l’ensemble des procédures et territoires. Au Québec, la procédure de vérification et les frais afférents (qui sont minimes) ne s’appliquent qu’aux testaments olographes qui n’ont pas été notariés. Les résidents sont ceux qui sont réputés résider au Canada aux fins de l’impôt sur le revenu. 2 Ce régime s’applique aux résidents canadiens, mais non aux personnes des États-Unis (cette dernière catégorie incluant les citoyens américains, les résidents des États-Unis et les résidents permanents détenteurs d’une carte verte) ni à ceux qui séjournent aux États-Unis pendant une durée importante et ne répondent pas aux critères du formulaire 8840 (Closer Connection Exception Statement for Aliens). Les incidences fiscales sont très différentes pour les personnes des États-Unis, même celles qui résident au Canada et/ou ont la citoyenneté canadienne. Ces particuliers devraient donc consulter un spécialiste de la fiscalité transfrontalière pour discuter de leur situation. 3 En 2017, la loi américaine intitulée Tax Cuts and Jobs Act, H.R.1, a doublé le montant d’exclusion de base aux fins de l’impôt successoral et sur les donations, qui s’élève maintenant à 10 000 000 $ US par personne des États-Unis (et qui est indexé selon l’inflation). Pour l’année 2024, le montant d’exclusion de base est de 13 610 000 $ US par personne des États-Unis. Le montant d’exclusion de base aux fins de l’impôt successoral et sur les donations découle d’une disposition de temporisation qui deviendra caduque après le 31 décembre 2025, après quoi le montant d’exclusion sera ramené à 5 000 000 $ US (indexé selon l’inflation). Une nouvelle loi devra être adoptée afin de prolonger l’effet des dispositions de temporisation après 2025. 4 Le montant de 5 389 800 $ équivaut à l’impôt successoral des États-Unis exigible pour des biens d’une valeur de 13 610 000 M$.
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